• Emigration clandestine : Comment sont traités les Marocains en Libye ?!


    De nombreux migrants marocains et subsahariens sont maltraités dans des centres de détention libyens... Ils projetaient de se rendre clandestinement en Italie via Tripoli.




    « Je réclame le corps de mon fils ! ». Ce cri de désespoir est celui du père d'Aydouni Mohamed. Un jeune Marocain disparu en Libye depuis trois ans. À 28 ans, il s'est rendu par avion à Tripoli dans l'espoir d'entrer plus tard, en secret, en Italie. Il croyait fort à son projet. Son passeur, payé à 4000 euros, est de sa famille.


    MOHAMED n'est plus revenu. Maintenant, il est déclaré officiellement mort. Après de vaines recherches en Libye, ses parents ne parviennent pas à trouver son corps. Ils accusent les autorités libyennes de l'avoir liquidé. D'après eux, le passeur sévit toujours en toute impunité.


    Comme les parents de Mohamed, de nombreuses autres familles sont sans nouvelles d'un fils, d'une fille, d'un frère ou d'une sœur. Tous partis en Libye dans l'espoir d'entrer coûte que coûte en Italie.


    Certaines familles, désemparées, se sont adressées à l'association marocaine des familles et des amis des victimes de l'immigration clandestine (Afvic) pour témoigner et chercher du soutien.


    « Près de 750 migrants Marocains (763 selon Nouzha Chekrouni, ministre déléguée chargée des Marocains résidant à l'étranger, voir encadré) et un nombre encore plus important d'Africains subsahariens sont jetés, sans procès, dans les centres de détentions libyens », clame Khalil Jemmah, président de l'Afvic. Ce dernier évoque des cas de torture et de spoliation de biens de « migrants clandestins ». Il accuse des éléments des forces de l'ordre libyennes de ces actes. Il révèle également des cas de viol dans des centres de détention de jeunes émigrées en situation irrégulière.


    Kamal Ghalfi, 20 ans, vient d'être extradé au Maroc. Ce jeune Casablancais appuie les propos de K. Jemmah. Il se rappelle, les yeux mouillés, les 21 jours qu'il a passés dans la prison d'El Fellah. « C'était l'enfer, j'ai failli crever de faim et de fatigue à force de travailler comme un esclave pour mes geôliers », résume-t-il, ému. Le jour où il a été incarcéré, Kamal avait échappé de peu à la mort. Il était parmi les rares rescapés, après le chavirement du bateau surchargé qui devait l'amener « clandestinement » à l'île italienne de Lampedusa.


    Mehdi Rajaâ Allah, 31 ans, de Khouribga, est passé aussi par la prison d'El Fellah. Il confie : « Plus de 40 personnes dont des Marocains, des Camerounais, des Maliens, des Soudanais, des Tchadiens, des Egyptiens, Congolais (RDC)... sont tabassés sans raison, giflés, humiliés... ». Il ajoute, la voix étouffée : « on nous entassait comme du bétail dans des hangars puants ». L'Afvic déclare avoir recueilli une soixantaine de témoignages tout aussi accablants que ceux présentés par Mehdi, Kamal et les autres. Leurs auteurs sont pour la plupart des rescapés de la mésaventure libyenne.


    L'Afvic avec d'autres associations de défense des droits de l'Homme projettent de hausser le ton à l'occasion de la journée internationale des migrants, célébrée ce 18 décembre. Ajoutée au ballet diplomatique entre Rabat et Tripoli entrepris au sujet des émigrés clandestins marocains, cette pression pourrait pousser le pays de Kadhafi à lâcher du lest.

    Mohamed Zainabi



    Mis en ligne le 20 décembre 2006

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